Court-métrages français
Il y a-t-il encore un intérêt à faire du court-métrage ? Devons-nous encore faire du court-métrage ?
Préambule
Un court-métrage est un film qui se définit par sa durée, dont la définition précise donnée par le CNC est un film dont la durée est inférieure à 60 min. Le court métrage existe dans la même diversité de formes, de techniques et de genres que le long métrage : documentaire, fiction, film en prise de vues réelles, film d'animation, film expérimental, etc.
Avec une accessibilité toujours plus simplifiée aux contenus de divertissement, notamment avec les plateformes de streaming, et un allongement de la durée des long-métrages, on peut se demander si il y a toujours un intérêt à faire des films courts.
Pour répondre à cette question, nous allons analyser le financement et le coût de production d'un court-métrage, les aides dont il peut bénéficier, son exploitation en salle ainsi que son parcours en dehors du territoire français.

Coût moyen de production
Courbes représentant le coût moyen de production d'un court-métrage en France de 2011 à 2020 en milliers d'euros, en fonction de son genre et d'aides dont il a bénéficié.
On remarque que les court-métrages d'animation ont toujours eu un coût plus élevé car le processus de production est long. Le coût moyen pour ce genre de film a évolué de 162,3K€ en 2011 à 200.5K€ en 2019. On observe qu'en 2020 il y a une baisse marquée du coût moyen, 130,4K€, certainement la conséquence de la pandémie de Covid-19. Pour ce qui est des coûts moyen de production pour les films ayant bénéficié des aides du CNC, on a un coût moyen de production plutôt constant, compris entre 109,7K€ et 125,4K€. Sauf durant la période de 2020 où le coût moyen pour les films ayant bénéficié d'aides du CNC est de 93,9K€. Le coût moyen de production pour les fictions est lui aussi plutôt constant avec un coût compris entre 64K€ et 83K€. Le coût moyen de production pour les court-métrages documentaire est celui qui varie le plus et qui a le coût moyen le plus bas. Il varie aux alentours de 60K€. Le coût moyen de production tous genres confondus est d'environ 80K€, 76,1K€ en 2011 et 88,5K€ en 2019. On remarque que la courbe suit celle du coût moyen de production des court-métrages de fiction, on peut ainsi en conclure que le nombre de fictions est plus important que les autres genres, il influt donc majoritairement dans le coût moyen de production global. On constate également une baisse du coût de production, peu importe le genre, en 2020 à cause du coronavirus.
Aides du CNC
Définitions des différentes aides :
L'aide avant réalisation a pour objectif de favoriser le renouvellement de la création nouveaux auteurs et d’accompagner la création. L'aide au programme d'entreprise quant à elle accompagne le développement d'un tissu de sociétés qui produisent régulièrement du court métrage et qui prennent les risques inhérents à la recherche de nouveaux talents. L'aide après réalisation distingue les qualités artistiques des films et de la musique originale, et récompense la prise de risque du producteur. L'aide automatique permet à un producteur de long-métrage d'utiliser le compte de soutien financier cinéma sur la production d'un court métrage. Des allocations directes existent pour la programmation en salle.
Part des aides du CNC, en pourcentage, dans le devis des court-métrages en 2021, selon leur genre.
On remarque que l'aide avant réalisation consitue environ 40% des devis de court-métrages tous les genres confondus. L'aide après réalisation est celle avec le moins de part dans les devis, avec 18% de part dans les devis des documentaires / films expérimentaux, 8% de part dans l'animation, et 12% de part dans les devis des court-métrages de fiction. L'aide au programme à une part de 55% dans le devis des films documentaire et expérimental, ce qui fait l'aide avec la part la plus grande pour le devis d'un documentaire ou d'un court-métrage expérimental sûrement car cela est plus risqué pour les producteurs de s'engager dans ce genre de projet et donc ils bénéficient de l'aide au programme. Même explication pour la part de 48% dans le devis des fictions, qui constitue là encore la part la plus importante d'aides, avec des court-métrages qui peuvent paraître trop audacieux. Les aides du CNC constituent ainsi une part importante des budgets des court-métrages.
Montant moyen d'aide du CNC par court métrage selon le genre en 2021 (€).
Sur cet histogramme on identifie l'aide avant réalisation comme celle avec le montant moyen le plus élevé, entre 55 000€ et 82 000€ tous genres confondus, avec encore une fois un montant plus élevé pour les films d'animation. L'aide après réalisation est celle avec le montant moyen le moins élevé, seulement entre 7 000€ et 8 333€. On notera ainsi que l'animation est le genre avec le montant d'aide moyen le plus élévé avec 34 766€, ensemble des aides compris.
Exportation
Exportation des court-métrages français en fonction du chiffre d'affaire selon leur genre (K€).
Concernant l'exportation des court-métrages français, on remarque que le chiffre d'affaire est plus élevé avec les films de fiction, entre 262,5K€ en 2015 et 421,8K€ de chiffre d'affaire en 2021. Le genre avec le chiffre d'affaire le plus bas, toutes les années confondus, est celui du documentaire et du court-métrage expérimental, avec environ 13K€ à 36K€ de 2015 à 2021. L'ensemble rapporte un chiffre d'affaire de 488,2K€ en 2011 et de 769,1K€ en 2021 soit une augmentation d'environ 54% en 10 ans.
Exportation des court-métrages français en termes de transactions par zone géographique (%).
Le nombre de transactions dû à l'exportation des court-métrages vient en majorité d'Europe occidentale en comprenant 41,56% en 2011 et 41,3% en 2021. Les parts de transactions des autres zones géographiques n'ont pas eu une évolution marquante. Sauf en 2021, où on remarque une hausse de la part des transactions de l'Amérique du Nord avec 14 points de pourcentage de plus, réduisant ainsi la part des transactions avec l'Europe centrale et orientale avec environ 8 points de pourcentage de moins par rapport à 2011.
*Ventes réalisées à des sociétés françaises (TV5, Canal+ Afrique, Arte, etc.). Source : Unifrance.
Exportation des court-métrages français en termes de transactions par type de droits de diffusion (%).
Concernant l'exportation des courts métrages français en termes de transactions par type de droits de diffusion, on observe une hausse significative de 30 points de pourcentage sur la VOD en 2021 par rapport à 2012, rétrécissant ainsi les parts de la télévision, de la vidéo physique et des droits combinés. Seule la part des transactions des court-métrages exploités en salles est restée immobile en 10 ans, avec 52,1%.
**Location de copies et droits d'exploitation en salles.
Fréquentation en salles
Films de court-métrage exploités en salles.
En éliminant l'année 2020, à cause du Covid-19, on voit une hausse très marquée du nombre de court-métrages exploités en salles dans des programmes adaptés, avec 904 films exploités en 2009 et 3 207 courts métrages exploités en 2021. On remarque quand même une centaine de films diffusés en salles hors des programmes de court-métrages et exploités des deux façons (dans un programme et hors programmes).
***Total sans double compte
Entrées des films de court-métrage en salles (milliers).
Les entrées des court-métrages en salles ont augmenté dans les programmes dédiés avec 2 331 entrées en 2014 et 3 178 entrées en 2018. On considère également les entrées hors programmes de court-métrages avec une légère hausse d'une centaine d'entrées entre 2014 et 2018. Au total les films courts font environ 3 000 entrées, sans compter les années du coronavirus.
Conclusion
Pour finir, l'analyse de ces données ont mis en exergue les coûts moyen des court-métrages assez élevés mais qui peuvent être absorbés en partie par les aides du CNC. Les court-métrages d'animation, bien qu'étant le genre avec le coût moyen de production le plus élevé est également celui qui bénéficie du montant d'aide moyen le plus élevé. Aussi les films courts apportent un rayonnement de la France important avec des chiffres d'affaire très rentable, des transactions sur toutes les plateformes de diffusion et sur plusieurs zones géographiques. L'évolution des modes de consommation est donc très lisible à travers ces données. La France marque de nouveau sa puissance et constance en termes d'exploitation en salles, notamment grâce à la chronologie des médias qui ordonne la diffusion des contenus par rapport au moyen de diffusion. Il y a donc encore un grand intérêt à faire du court-métrage car le public s'aggrandit et se déplace plus en salle pour voir ces contenus. Également les films s'exportant à l'international et ont un montant moyen de transactions supérieur au coût moyen de production, environ 2 fois plus. De plus, les courts métrages ont accès à de multiples aides du CNC participants grandement aux financements de ces derniers. Enfin, il ne faut pas oublier que les court-métrages constituent un moyen important d'émergence des nouveaux réalisateurs. L'avenir du film court, avec les multiples festivals se développant, est donc en plein essor.